2e dimanche de l’Avent

En ce temps-là, comme Jean, dans sa prison, avait entendu parler des œuvres du Christ, il envoya deux de ses disciples lui dire : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » Jésus leur répondit : « Allez rapporter à Jean ce que vous avez entendu et vu : les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, les pauvres sont évangélisés ; et heureux celui qui ne sera pas scandalisé à mon sujet ! » Comme ils s’en allaient, Jésus se mit à dire aux foules au sujet de Jean : « Qu’êtes-vous allés voir au désert ? Un roseau agité par le vent ? Qu’êtes-vous donc allés voir ? Un homme vêtu d’habits douillets ? Mais ceux qui portent des habits douillets sont dans les palais des rois. Qu’êtes-vous donc allés voir ? Un prophète ? Oui, je vous le dis, et plus qu’un prophète. Car c’est de lui qu’il est écrit : Voici que j’envoie mon ange au-devant de toi, pour préparer la voie devant toi. »

Une question, frères très chers, se pose à nous : Jean était un prophète, et même plus qu’un prophète, puisqu’il a fait connaître le Seigneur venant se faire baptiser dans le Jourdain, en déclarant : « Voici l’Agneau de Dieu, voici celui qui enlève le péché du monde » (Jn 1, 29), et que considérant à la fois sa propre bassesse et la puissance de la divinité du Seigneur, il a dit : « Celui qui est terrestre a aussi un langage terrestre, mais celui qui vient du Ciel est au-dessus de tous » (Jn 3, 31) ; pourquoi donc, une fois emprisonné, envoie-t-il ses disciples demander : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » comme s’il ne connaissait pas celui qu’il avait montré, et comme s’il ne savait pas que le Christ était bien celui qu’il avait proclamé en le prophétisant, en le baptisant et en le montrant ?

Mais cette question trouve vite sa réponse si l’on examine le temps et l’ordre dans lesquels se sont déroulés les faits. Sur les rives du Jourdain, Jean a affirmé que Jésus était le Rédempteur du monde ; une fois emprisonné, il demande pourtant s’il est bien celui qui doit venir. Ce n’est pas qu’il doute que Jésus soit le Rédempteur du monde, mais il cherche à savoir si celui qui était venu en personne dans le monde va aussi descendre en personne dans les prisons infernales. Car celui que Jean a déjà annoncé au monde comme précurseur, il le précède encore aux enfers par sa mort. Il demande donc : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » C’est comme s’il disait clairement : « De même que tu as daigné naître pour les hommes, fais-nous savoir si tu daigneras aussi mourir pour eux, en sorte que précurseur de ta naissance, je le devienne aussi de ta mort, et que j’annonce aux enfers que tu vas venir, comme j’ai déjà annoncé au monde que tu étais venu. »

C’est pour cela que la réponse du Seigneur, à la question ainsi posée, traite de l’abaissement de sa mort aussitôt après avoir énuméré les miracles opérés par sa puissance, quand il dit : « Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, les pauvres sont évangélisés ; et heureux celui qui ne sera pas scandalisé à mon sujet ! » A la vue de tant de signes et de si grands prodiges, nul n’avait sujet de se scandaliser, mais bien plutôt d’admirer. Il s’éleva cependant un grave scandale à son endroit dans l’esprit des infidèles lorsqu’ils le virent mourir, même après tant de miracles. D’où le mot de Paul : « Nous prêchons un Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens » (1 Co 1, 23). Oui, les hommes regardèrent comme une folie que l’Auteur de la vie mourût pour eux ; et l’homme a trouvé moyen de se scandaliser à son sujet pour ce qui aurait dû exciter davantage sa reconnaissance. Car Dieu doit être honoré d’autant plus dignement par les hommes qu’il a été jusqu’à subir pour eux des traitements indignes.

Quel est donc le sens des paroles du Seigneur : « Heureux celui qui ne sera pas scandalisé à mon sujet ! » Ne veut-il pas désigner clairement l’abjection et l’abaissement de sa mort ? C’est comme s’il disait ouvertement : « Il est vrai que je fais des choses admirables, mais je ne refuse pas pour autant d’en souffrir d’ignominieuses ; puisque je vais te suivre [Jean-Baptiste] en mourant, que les hommes se gardent bien de mépriser en moi la mort, eux qui vénèrent en moi les miracles. »

Saint Grégoire le Grand, début de la 6e homélie sur les évangiles, prononcée le 10 décembre 590 en la basilique des saints Marcellin et Pierre.


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Une réflexion sur “2e dimanche de l’Avent

  1. Enfin, par cette homélie de saint Grégoire le Grand, j’ai la réponse que j’ai attendue depuis si longtemps du fait que saint Jean le Baptiste savait qu’il était le Seigneur depuis le baptême de notre Rédempteur dans le Jourdain par y celui, alors que, sachant sin exécution prochaine, il fait demander par les disciples de Jésus dans la prison de l’immonde Hérode s’il est bien élu qui doit venir.

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